Une faute grave en cas d’absence injustifiée, c’est pas automatique !
| Droit social |
Par Guillaume Roland, le 16 février 2024
La tentation est grande lorsqu’un salarié est absent sans raison ou sans justification de considérer qu’il a rompu le pacte de confiance, surtout lorsque son absence même de courte durée, perturbe le fonctionnement de l’entreprise : un hôte d’accueil qui laisse son accueil vide, un infirmier qui délaisse le bloc opératoire, le chauffeur qui ne prend pas son bus etc.
L’employeur est d’autant plus enclin à sortir la carte de la faute grave pour des raisons d’exemplarité.
Dans le cas jugé par la Cour de cassation*, un salarié dont le poste était stratégique avait « disparu » dès le 22 octobre 2018 pendant une période d’activité intense de l’entreprise, sans à aucun moment justifier de son absence et ce malgré une mise en demeure de son employeur du 5 novembre suivant.
A première vue, le dossier se présentait mal pour le salarié.
En y regardant de plus près, la situation était plus nuancée : outre le fait qu’il avait une grande ancienneté et un passé disciplinaire irréprochable, le salarié s’était absenté afin de porter assistance à sa mère en raison de son état de santé dégradé et de son isolement, ce qui était connu de l’employeur avant l’engagement de la procédure de licenciement.
La Cour d’appel, suivie par la Cour de cassation ont considéré que le licenciement ne pouvait être prononcé pour faute grave et ont retenu une faute simple, ce qui donnait droit au salarié aux indemnités de licenciement et de préavis.
Les juridictions sociales utilisent souvent le double critère de l’ancienneté et du passé irréprochable pour atténuer la sanction, rappelant au passage que le juge doit apprécier la proportionnalité de la sanction à la faute commise (la cause du licenciement doit en effet être « réelle et sérieuse »). Ainsi, même en cas de menace de mort proférée à l’encontre d’un collègue, la faute grave n’a pas été retenue compte tenu d’une grande ancienneté et d’un passé sans tache (cf. par exemple CA Paris, 2 mars 2017 n°13/03806 ou Amiens, 17 juin 2021 n°20/01800).
Notre avis : Dans une hypothèse de faute commise par un salarié, il faut se garder de toute recette et prendre en compte tous les paramètres. Retenons que si une grande ancienneté et un passé disciplinaire irréprochable permettent d’amoindrir la sanction, elles n’absolvent en rien le salarié fautif. De même, une faute commise sans circonstances atténuantes peut conduire à une grande sévérité. Tout est une question de proportion !
*Cass. Soc., 17 janvier 2024, nº 22-24.589
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