Preuve du temps de travail : tout est permis
| Droit social |
Par Guillaume Roland, le 22 mars 2024
Voici une mise au point bienvenue de la Cour de cassation.
Après toute une série de jurisprudences validant l’argumentaire de salariés qui demandaient le paiement d’heures supplémentaires avec pour justification des éléments fragiles (soit confectionnés de toutes pièces soit parcellaires) dès lors que l’employeur n’apportait aucun élément en réponse, la Cour retient qu’un employeur peut fournir en contradiction tout type d’éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Le risque était grand que la haute juridiction soit plus exigeante, car la Cour de justice de l’Union Européenne qu’elle suit régulièrement (rappelez-vous le fameux arrêt du 13 septembre 2023 sur les arrêts maladie qui sont dorénavant assimilés à du temps de travail effectif pour le décompte des congés payés cf. notre Hebdo du 22 septembre 2023), a posé que les employeurs sont dans l’obligation de mettre en place un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer le temps de travail quotidien (CJUE, 14 mai 2019, n° c-55/18).
Pour en revenir à la décision de la Cour de cassation qui nous intéresse*, celle-ci admet donc que, même en l’absence de mise en place d’un système de contrôle du temps de travail, tout élément peut être produit par l’employeur pour prouver le temps de travail, rappelant ainsi le principe d’égalité des armes sur le sujet. Une attestation, des feuilles de temps, des échanges de mails, un relevé téléphonique ou de cartes essence, peuvent donc être utilisés par un employeur.
Notre avis : Cette jurisprudence ne doit pas faire oublier qu’il appartient à l’employeur de prouver que chacun de ses salariés a pu disposer des repos quotidiens et hebdomadaires, ce qui, en creux, entre dans le décompte du temps de travail (il s’agit là d’ailleurs d’un autre héritage de l’Union européenne : directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 et Cass. Soc., 17 octobre 2012, n°10-17.370 ou plus récent Cass. Soc., 17 janvier 2024 n°22- 20.193)
*Cass. Soc. 7 février 2024 n°22-15.842
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