Panorama du droit social au premier semestre 2023

 

 

Par Guillaume Roland et Hugo Tanguy, le 13 juillet 2023

 

Pour le dernier numéro de sa lettre d’actualité avant l’été, le cabinet HERALD vous propose un tour d’horizon des quelques points clés qui selon nous, sont à retenir ou à surveiller dans l’actualité en droit social du premier semestre 2023.

 

Réforme des retraites : premières précisions

Alors que les deux premiers décrets d’application de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (dite « loi retraites ») viennent d’être publiés le 4 juin dernier (respectivement sur les modalités de l’augmentation progressive de l’âge d’ouverture des droits à la retraite ; et sur les départs anticipés au titre des carrières longues et du handicap), deux nouveaux projets de décrets ont été présentés au Conseil d’administration de la CNAV pour une publication à la fin du mois de juillet.

Ces projets de décrets visent à encadrer le dispositif de retraite progressive qui devrait rester accessible deux ans avant l’âge légal, et être progressivement relevé selon le même rythme que le calendrier prévu pour l’âge de départ.

Les critères d’éligibilité devraient également demeurer les mêmes pour les salariés à temps partiel ou temps réduit.

Les travailleurs (salariés ou non) qui ne sont pas soumis à une durée du travail définie (jusqu’alors non-éligibles au dispositif) devraient désormais être soumis à une condition de revenu minimal (a priori 40% du SMIC).

Pas moins de 31 décrets sont encore attendus, dont certains pourraient paraître cet été.

 

Projet de loi sur le partage de la valeur

Le Gouvernement s’apprête à transposer dans la loi, l’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur, signé en février dernier par les partenaires sociaux.

Le projet prévoit notamment que les entreprises de 11 à moins de 50 salariés réalisant pendant 3 exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1% du chiffre d’affaires devront mettre en place au cours de l’exercice suivant un régime de participation ou d’intéressement, un abondement à un plan d’épargne salariale ou d’épargne retraite ou une prime de partage de la valeur (PPV).

De même, les entreprises d’au moins 50 salariés devraient ouvrir une négociation sur le partage de la valeur en cas de « résultats exceptionnels ».

Enfin le dispositif de prime de partage de la valeur (PPV) devrait être modifié, permettant désormais le versement de deux primes chaque année.

 

Présomption de démission, la « girouette » du Ministère du travail

Issue de la loi du 21 décembre 2022 dont les modalités pratiques sont développées par le décret du 17 avril 2023, la nouvelle présomption de démission, qui permet à l’employeur de considérer comme démissionnaire un salarié en abandon de poste après mise en demeure et écoulement d’un délai de 15 jours, n’en finit pas de susciter les interrogations.

L’employeur peut-il encore choisir entre cette présomption et un licenciement pour faute classique ?

Le Ministère du travail, dans son « questions-réponses » publié le jour de la publication du décret, semblait considérer que non.

Face aux vives critiques des praticiens du droit du travail (plusieurs recours ont été introduits devant le Conseil d’Etat), le Ministère a finalement retiré le 5 juin son question-réponses de son site internet, tout en maintenant, semble-t-il, son interprétation.

Un nouveau degré de complexité s’ajoute donc encore à un dispositif déjà inutilement complexe…

 

Le temps de déplacement des salariés itinérants

Selon la Chambre sociale de la Cour de cassation, si les temps de déplacement domicile-clients d’un salarié itinérant correspondent à la définition du temps de travail effectif, ils doivent être rémunérés comme tel (et non au titre de la contrepartie financière ou en repos de l’article L3121-4).

Le fait que les déplacements en question soient soumis à un planning prévisionnel ou que le salarié utilise un véhicule de service peut notamment constituer une preuve de ce temps de travail.

Cass. Soc., 1er mars 2023, n°21-12.068

Cass. Soc., 7 juin 2023, n°21-22.445

 

– Assouplissement de la preuve des heures supplémentaires

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures supplémentaires accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies, afin de permettre à l’employeur, dont l’obligation est de contrôler les heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Si l’employeur ne produit aucun élément, la Chambre sociale de la Cour de cassation considère désormais comme suffisamment probants des éléments produits par le salarié a priori peu précis et peu étayés, tels qu’un tableau sans mention des horaires effectués.

 Cass. Soc., 15 mars 2023, n°21-16.057

Cass. Soc., 10 mai 2023, n°21-21.788

 

Le dépassement des durées maximales de travail cause nécessairement un préjudice

La Chambre sociale de la Cour de cassation admet au compte-gouttes des exceptions au principe selon lequel le salarié doit apporter aux débats des éléments justificatifs de l’existence et de l’évaluation de son préjudice, pour en obtenir réparation.

C’est notamment le cas en matière de dépassement des durées maximales du travail, qui cause nécessairement un préjudice au salarié, l’employeur devant garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d’un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail.

Cass. Soc., 11 mai 2023, n°21-22.281

 

 

Toute l’équipe du Pôle social du cabinet HERALD vous souhaite un très bel été, et vous donne rendez-vous le 1er septembre pour un nouveau numéro !

 

 

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