Le code vestimentaire à l’épreuve de l’égalité des sexes

 

 

Par Guillaume Roland et Julie Pleuvretle 16 décembre 2022

 

A l’instar de nombreuses entreprises, une compagnie aérienne avait adopté un manuel pour encadrer l’apparence physique de ses personnels navigants commerciaux directement en contact avec la clientèle. Cependant ce manuel interdisait aux hommes des coiffures qu’il autorisait au personnel féminin.

Sur le fondement de ces règles, un steward qui s’était présenté à l’embarquement à plusieurs reprises coiffé de tresses africaines nouées en chignon s’est vu refuser l’accès à son poste. Il s’est alors résigné à porter une perruque pour exercer ses fonctions.

Licencié après avoir été reconnu définitivement inapte à son poste en raison d’un syndrome dépressif d’origine professionnelle, il saisit le Conseil de Prud’hommes pour contester son licenciement et demander des dommages et intérêts pour discrimination, harcèlement moral et déloyauté.

Il ne sera pas suivi par la Cour d’appel qui accueille l’argumentation de l’employeur et juge que « si le port de tresses africaines nouées en chignon est autorisé pour le personnel navigant féminin, l’existence de cette différence d’apparence, admise à une période donnée entre hommes et femmes en termes d’habillement, de coiffure, de chaussures et de maquillage, qui reprend les codes en usage, ne peut être qualifiée de discrimination ».

Puis, elle affirme que « la présentation du personnel navigant commercial fait partie intégrante de l’image de marque de la compagnie, que le salarié est en contact avec la clientèle (……) et que la volonté de la compagnie de sauvegarder son image est une cause valable de limitation de la libre apparence des salariés ».

Ni les stéréotypes de genre ni l’image de marque de l’entreprise ne vont convaincre la Cour de cassation* qui censure la Cour d’appel.

Elle rappelle qu’en présence d’une discrimination directement fondée sur l’apparence physique en lien avec le sexe, le motif tiré de la nécessité d’identifier le personnel et de préserver l’image de l‘entreprise est inopérant, avant d’affirmer que la perception sociale de l’apparence physique des genres masculin et féminin, ne peut constituer une exigence professionnelle véritable et déterminante justifiant une différence de traitement relative à la coiffure entre les femmes et les hommes.

 

Notre avis : 10 ans après avoir donné raison au serveur d’un restaurant gastronomique auquel il était interdit de porter des boucles d’oreilles pendant le service, la haute Cour confirme que l’exigence professionnelle véritable et déterminante de nature à justifier une différence de traitement en raison du sexe doit être trouvée dans la nature ou les conditions d’exercice de l’activité professionnelle du salarié et nulle part ailleurs.

 

*Cass. Soc. 23 novembre 2022, n°21-14.060