Du bon usage des heures supplémentaires
Par Guillaume Roland et Julie Pleuvret, le 15 octobre 2021
Si la distinction entre la modification des conditions de travail qui relève du pouvoir unilatéral de direction de l’employeur, et la modification du contrat de travail qui requiert l’accord du salarié est fondamentale, elle n’est pas toujours facile à faire.
Le régime des heures supplémentaires l’illustre parfaitement.
De jurisprudence constante, les heures supplémentaires imposées par l’employeur en raison des nécessités de l’entreprise dans la limite du contingent dont il dispose légalement, n’entraînent pas modification du contrat de travail.
Le salarié qui refuse, sans motif légitime, d’effectuer les heures supplémentaires demandées par l’employeur se met en faute.
Sur la base de ces principes, un salarié engagé sur une base horaire hebdomadaire de 35 heures et qui persistait à refuser d’effectuer 50 minutes de travail supplémentaire par jour lesquelles portaient sa durée hebdomadaire à 39 heures, est licencié pour faute grave après plusieurs avertissements et une mise à pied disciplinaire.
Saisie par l’employeur, la Cour de cassation* approuve la Cour d’appel qui « ayant relevé que le recours systématique à des heures supplémentaires portait la durée du travail du salarié de 35 heures à 39 heures, a retenu, à bon droit, que le caractère systématique de ce recours modifiait le contrat de travail de l’intéressé, en a exactement déduit que la société ne pouvait valablement augmenter la durée hebdomadaire de travail du salarié qu’avec son accord exprès ».
Le recours habituel aux heures supplémentaires, même en raison des nécessités de l’entreprise et dans la limite du contingent, requiert l’accord du salarié.
En conséquence, le salarié était en droit de refuser cette modification et son refus ne peut donc à lui seul être considéré comme fautif.
Notre avis : La réalisation des heures supplémentaires cesse de relever du pouvoir de direction de l’employeur lorsque ces heures sont détournées de leur finalité pour augmenter la durée du travail de manière pérenne. Rappelons que le salarié dans une telle hypothèse pourrait très certainement prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur.
* Cass., Soc., 8 septembre 2021, n° 19-16.908
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