Contestation d’expertises : n’est pas expert qui veut !

 

Par Guillaume Roland et Sandrine Rousseau, le 17 novembre 2023

 

Dans le cadre de ses consultations annuelles obligatoires, le Comité Social et Economique (CSE) peut se faire assister d’experts, dont les prestations sont en tout ou partie rémunérées par l’employeur.

Ce dernier conserve toutefois la possibilité de contester l’expertise votée par le CSE, qu’il s’agisse de l’expertise en elle-même (nature et objet) ou de son coût, sous réserve d’agir (à peine de forclusion) dans un délai de 10 jours calendaires dont le point de départ varie.

C’est précisément au sujet du point de départ de la contestation de la nature de l’expertise que la Cour de cassation a eu à se prononcer pour la première fois le 18 octobre dernier*.

Dans l’affaire qui lui était soumise, le CSE avait décidé de recourir à un expert pour l’assister en vue de la consultation annuelle obligatoire portant sur la situation économique et financière de l’entreprise (L2315-88 du Code du travail) et de celle sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi (article L2315-91 du même code).

A l’issue des expertises ayant duré plusieurs semaines, la facture de solde d’honoraires de l’expert avait été adressée à l’employeur.

L’employeur refuse de la régler et attrait l’expert en justice aux fins d’obtenir le remboursement de l’acompte versé en début de mission, et de contester la facture finale, au motif que les expertises décidées par son CSE constituaient « des expertises libres dont il n’avait pas à assumer le coût ».

Il fut débouté de ses demandes car hors délai (forclos) et condamné au paiement intégral.

Il forma alors un pourvoi en cassation en soutenant d’une part qu’il ne contestait pas la nécessité des expertises mais leur coût et ne pouvait donc agir qu’à compter de la facture définitive, et d’autre part que ces expertises devaient être considérées comme libres (et par conséquent à la charge financière du CSE) car décidées bien avant la tenue des consultations obligatoires.

Ces arguments furent rejetés par la Cour de Cassation qui retient que « l’employeur ne critique ni le montant des factures qui lui ont été adressées ni le coût final des expertises mais conteste le principe de son paiement… » ce qui revenait en réalité à contester la nécessité de l’expertise (dont le délai de contestation court à compter de la lettre de mission adressée à l’employeur et qui précise la nature et l’objet de l’expertise) et non son coût (dont la contestation a pour point de départ la réception de la facture).

 

Notre Conseil : Lorsque votre CSE décide de recourir à un expert, ne tardez pas à nous consulter et à nous transmettre la lettre de mission de l’expert dès réception, afin que nous puissions analyser avec vous si cette expertise peut être contestée.

 

*Cass. Soc. 18 octobre 2023 n° 22-10.761

 

=> Pour tout conseil en droit social ou droit de la sécurité sociale, nous vous invitons à contacter Guillaume Roland, associé => g.roland@herald-avocats.com