Le salarié qui travaille pour une autre société pendant un arrêt maladie commet-il une faute ?
Par Guillaume Roland et Sandrine Rousseau le 11 mars 2022
Un salarié était employé comme chauffeur-livreur au sein d’une société de transport de colis et considéré comme salarié protégé au sein de l’entreprise du fait de ses fonctions de représentant du personnel.
A la suite d’un accident du travail et alors qu’il était en arrêt, le salarié en a profité pour travailler en qualité de chauffeur-livreur pour le compte d’une autre société, spécialisée dans le transport urgent de produits médicaux vers des professionnels de santé.
L’employeur ayant découvert les faits, il a engagé une procédure de licenciement disciplinaire au motif d’un manquement à l’obligation de loyauté.
Le licenciement pour faute ayant été autorisé par l’inspecteur du travail, le salarié a exercé un recours devant le tribunal administratif, qui a finalement annulé l’autorisation de licenciement ; ce jugement a été confirmé par la Cour administrative d’appel.
Par un arrêt du 4 février 2022*, le Conseil d’Etat approuve les juges du fond d’avoir jugé que le manquement à l’obligation de loyauté n’était pas caractérisé, dans la mesure où l’activité des deux sociétés ne se recouvraient pas et n’étaient pas concurrentes.
Il ressort de cette décision que le manquement à l’obligation de loyauté n’est caractérisé (et par conséquent le licenciement disciplinaire n’est justifié), qu’en présence d’un travail effectué pour une société concurrente de l’employeur, peu important que les fonctions du salarié soient de même nature dans les deux entreprises.
Ainsi, le seul fait que le salarié exerce pendant une période de suspension de son contrat de travail, une activité, même identique, dans une autre entreprise que celle de son employeur, ne suffit pas à caractériser une faute permettant de le licencier.
La position du Conseil d’Etat rejoint ainsi celle de la Cour de cassation applicable aux salariés non protégés (Cass. Soc., 5 juillet 2017, n° 16-15.623)
Notre Conseil : Même si le comportement du salarié est moralement répréhensible, il importe au plan juridique, de ne pas vous engager trop rapidement vers une rupture du contrat de travail et de bien vérifier si l’activité de l’autre société est concurrente à la vôtre.
* CE 4 février 2022 n° 438412, Sté Chronopost c/ L.
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