Vacances, j’oublie tout … même une tenue formelle
Par Guillaume Roland, le 22 juillet 2022
Ca y est les vacances, c’est pour demain (c’est effectivement le dernier hebdo avant la pause estivale … mais le cabinet ne ferme pas pour autant, qu’on se le dise !). A nous les grasses matinées, les déjeuners interminables et … les tenues décontractées.
Sur ce dernier point, tout a évolué très vite depuis quelques années et nombre d’institutions avec leurs règlements obsolètes à cet égard, semblent bien dépassées. Sur ces 10 dernières années, le marché du costume a ainsi chuté de 60% comme celui de la cravate. Les tailleurs féminins ont connu la même tendance.
Aujourd’hui, le « Friday-wear », c’est tous les jours. Le covid est passé par là : comment reprendre son tailleur lorsque les visios en pilou ou jogging étaient si agréables ?
Mais si la société a évolué qu’en est-il de notre droit sur ce sujet ? La fameuse jurisprudence du bermuda, qui date déjà de 2008, est-elle encore d’actualité ? (la Cour de cassation avait validé le licenciement d’un salarié s’obstinant à porter un bermuda alors qu’il était en contact avec une clientèle sans doute très austère – Cass. Soc. 12 novembre 2008 n°07-42.220).
Notons que sans changement « la liberté de se vêtir à sa guise au temps et au lieu du travail n’entre (toujours) pas dans la catégorie des libertés fondamentales » (principe posé par Cass. soc., 28 mai 2003 n°02-40.273 qui jugeait déjà impossible le port d’un bermuda) et qu’un employeur peut encore limiter la liberté vestimentaire de ses salariés à condition (selon la formule consacrée) que cette limitation soit justifiée par la nature de la tâche à accomplir et qu’elle soit proportionnée au but recherché.
A l’instar de la jurisprudence autour de la liberté religieuse, les critères permettant d’imposer une tenue vestimentaire sont le contact avec la clientèle (CA Lyon 9 février 2022 nº 19/02319) et le respect des règles d’hygiène et de sécurité (Défenseur des droits n° 2019-205 du 2-10-2019 ann. 2, 3 et 5). Au-delà, une réelle liberté existe, encadrée par la morale, la décence et la culture d’entreprise. Les Cours d’appel font d’ailleurs une application très stricte de ces principes (le port d’un piercing visible a ainsi été admis pour un menuisier sans contact avec la clientèle – CA Amiens 17 février 2021 n°19/05424, l’obligation de porter un uniforme a été jugée illicite pour un agent de réservation d’un hôtel pas davantage en contact avec la clientèle – CA Paris 17 mars 2021 n°18/06939).
Depuis 2008, quelques accommodements se sont quand même fait jour : ainsi avec les épisodes de canicule récents, avons-nous vu fleurir un certain nombre de consignes d’entreprises, permettant aux salariés « d’adapter leurs tenues aux fortes chaleurs », sans que l’on sache exactement ce que cela recouvre. Un homme pourrait-il rencontrer la clientèle en bermuda ? Pour vendre des surfs sans doute, des produits financiers sans doute pas.
De même quelques jurisprudences ont-elles admis des tenues plus libres : ainsi le chef de rang d’un grand restaurant peut-il porter une boucle d’oreille (Cass. Soc. 11 janvier 2012 n°10-28.213). Mais ces jurisprudences restent rares.
En définitive, même si nos tenues vestimentaires ont évolué, elles restent encadrées par des principes de morale et de vie en société ; un certain formalisme reste de mise et notre droit, suivant le contexte, le poste occupé et les modes, suit la tendance.
Notre avis : comme le dit cette vieille chanson, « ce soir nous irons danser sans chemise, sans pantalon » mais demain au boulot, nous les remettrons ! Bonnes vacances à tous !
Pour tout conseil en droit social ou droit de la sécurité sociale, nous vous invitons à contacter Guillaume Roland, associé => g.roland@herald-avocats.com