Rester joignable pendant un voyage professionnel suffit-il à caractériser du temps de travail effectif ?
| Droit social |
Par Guillaume Roland et Sandrine Henrion, le 12 avril 2024
Les périodes durant lesquelles le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles constituent du temps de travail effectif (art. L. 3121-1 C. trav.).
Toutefois, tel n’est pas le cas du temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail (art. L. 3121-4 C. trav.), à moins qu’il ne dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail. Dans ce cas, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière.
Mais qu’en est-il du temps de déplacement lorsque le salarié est envoyé en mission à l’étranger ?
Un assistant commercial export réclamait un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires qu’il avait effectué durant ses temps de déplacement professionnel à l’étranger. Il produisait à l’appui de sa demande des attestations qui mentionnaient qu’il était joignable pour ses collaborateurs et que ceux-ci pouvaient le contacter quand il se trouvait à l’étranger et durant son temps de voyage.
La Cour d’appel en avait déduit qu’il restait en permanence à la disposition de son employeur et qu’il s’agissait effectivement de temps de travail effectif. Elle a estimé que le salarié pouvait donc prétendre à un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.
La Cour de cassation* a été plus restrictive et casse cet arrêt en précisant que les attestations ne suffisaient pas à caractériser que, « pendant ses déplacements, le salarié avait l’obligation de se tenir à la disposition de l’employeur et qu’il se conformait à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles. »
Elle reprend ainsi la définition de l’article L. 3121-1 du Code du travail et considère que le fait qu’un salarié reste joignable ne suffit pas à satisfaire les critères définissant le temps de travail effectif.
Notre avis : La Cour de cassation apporte ainsi une précision importante puisque le fait d’être joignable ne justifie pas à lui seul l’existence d’un temps de travail effectif. Le salarié devra également démontrer qu’il a été effectivement sollicité pendant ses voyages. Elle se rapproche ainsi de sa jurisprudence applicable aux périodes d’astreinte et aux temps de pause.
*Cass. Soc., 13 mars 2024, n°22-11.708
=> Pour tout conseil en droit social ou droit de la sécurité sociale, nous vous invitons à contacter Guillaume Roland, associé => g.roland@herald-avocats.com