La période d’éviction d’un salarié entre son licenciement jugé nul et sa réintégration peut désormais ouvrir droit à congés payés
Par Guillaume Roland et Julie Pleuvret, le 10 décembre 2021
Jusqu’à présent, le salarié réintégré dans son poste en conséquence de la nullité de son licenciement ne pouvait prétendre à des droits à congés payés au titre de la période d’éviction comprise entre son licenciement illégal et sa réintégration.
La Chambre sociale de la Cour de cassation considérait de façon constante que la période d’éviction subie par le salarié ne pouvait être assimilée à du temps de travail effectif et n’ouvrait droit qu’à une indemnité d’éviction réparant la totalité du préjudice subi et dont la nature indemnitaire était incompatible avec l’acquisition de congés payés.
Par un arrêt du 1er décembre 2021[1], elle opère un revirement pour mettre sa jurisprudence en conformité avec celle de la Cour de Justice de l’Union Européenne qui le 25 juin 2020[2] a tranché en faveur de l’acquisition d’un droit à congés payés pendant la période d’éviction.
Selon la CJUE, si l’objectif de permettre au salarié de se reposer suppose qu’il ait exercé une activité justifiant pour assurer la protection de sa sécurité et de sa santé, le bénéfice d’une période de repos, dans certaines situations spécifiques dans lesquelles le travailleur est incapable de remplir ses fonctions, le droit au congé annuel ne peut être subordonné à l’obligation d’avoir effectivement travaillé.
Tel est le cas lorsqu’un travailleur se trouve privé de la possibilité de travailler, pour une cause imprévisible et indépendante de sa volonté, telle qu’un licenciement jugé par la suite illégal.
Il en résulte que la période d’éviction doit être assimilée à une période de travail effectif aux fins de la détermination des droits au congé annuel payé.
Désormais, le juge français doit accorder des congés payés au titre de la période d’éviction, sauf, précise la Cour, lorsque le salarié a occupé durant cette période un autre emploi pour un autre employeur.
Notre avis : le coût de la réintégration s’en trouve donc considérablement alourdi d’autant que tous les droits à congés payés (légaux, conventionnel, contractuels ou issus d’un usage) sont concernés et que pour la CJUE les congés, dans l’hypothèse d’un licenciement nul, sont reportables sans limite.
[1] Cass. Soc., 1er décembre 2021, n° 19-24.766
[2] CJUE, 25 juin 2020, aff. C-762/18 et C-37/19
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