Renversement de la charge de la preuve en cas de résiliation judiciaire faisant suite à un accident du travail

 

| Droit social |

 

Par Guillaume Roland et Sandrine Henrion, le 8 mars 2024

 

Par principe, la résiliation judiciaire permet au salarié de solliciter la rupture de son contrat de travail devant le juge prud’homal en raison de manquements suffisamment graves de son employeur. Il lui revient toutefois de faire la démonstration du ou des manquements invoqués.

Si la réalité et la gravité de ces manquements est reconnue, son contrat de travail est rompu et le licenciement sera considéré comme nul ou injustifié. A contrario, le contrat se poursuivra normalement.

En l’espèce, un technicien, victime d’un accident du travail lui ayant causé une grave blessure à la main, a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire en se prévalant d’un manquement de son employeur à son obligation de sécurité en raison de l’absence de fourniture des équipements individuels de sécurité.

Il a, dans un premier temps, été débouté de sa demande par la Cour d’appel qui a estimé qu’il ne rapportait la preuve ni des circonstances dans lesquelles il avait été blessé sur son lieu de travail ni de l’inobservation par son employeur des règles de prévention et de sécurité à l’origine de l’accident.

La Cour de cassation dans son arrêt du 28 février 2024* casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel en reprenant le raisonnement du salarié selon lequel si un salarié invoque un manquement de l’employeur aux règles de prévention et de sécurité à l’origine de l’accident du travail, il appartient à l’employeur de justifier avoir pris toutes les mesures nécessaires pour satisfaire à son obligation de sécurité « renforcée » prévue aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail.

Ce faisant, la Cour fait peser la charge de la preuve sur l’employeur qui doit prouver qu’il a pris toutes les mesures de prévention et protection nécessaires à l’égard du salarié victime d’un accident du travail pour satisfaire à son obligation. Cette solution est à rapprocher de celle retenue en matière de prise d’acte, qui conclut dans le même sens (Cass. Soc. 12 janvier 2011, n°09-70.838).

 

Notre avis : Les questions de sécurité sont essentielles pour les juridictions sociales et il convient en cas de litige que l’employeur puisse se ménager des éléments de preuve nécessaires à la démonstration des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, mais également d’une organisation de moyens adaptés. Le DUERP et son suivi est un outil incontournable pour l’employeur, mais ce n’est pas le seul, s’il souhaite éviter que sa responsabilité soit engagée.

 

*Cass. Soc. 28 février 2024, nº 22-15.624

 

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